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Migrations

En tant que personnes exilées, nous avons pour la plupart vécu des événements traumatisants, parfois déclencheurs d’un trouble de stress post-traumatique (TSPT). Fuyant déjà les violences dans nos pays d’origine, notre parcours migratoire, parfois étalé sur plusieurs années, est souvent jalonné de périls, allant de la captivité aux tortures, en passant par les violences sexuelles, voire à la mort de compagnons. 1 personne sans titre de séjour sur 6 souffrirait ainsi de stress post-traumatique en France.

Une fois arrivés dans un pays que nous considérons comme « sûr », comme la France, les violences ne disparaissent pas ; elles prennent d’autres formes. Ne pas s’effondrer nous demande alors, à nous comme à nos enfants, beaucoup d’énergie d’autant plus que l’accès aux soins peut être long et compliqué.

Les professionnels et bénévoles qui nous accompagnent dans ce périple peuvent également être touchés par cette violence. Ils peuvent alors souffrir d’un TSPT vicariant, c’est-à-dire un trouble de stress post-traumatique provoqué par un événement non pas vécu directement mais à travers la souffrance d’un autre. Dans ce dossier, nous verrons qu’il existe des ressources pour repérer d’éventuelles blessures psychiques, chez soi et chez les autres, mais surtout pour les prendre en compte et vivre mieux.

Consulter le dossier intégral en PDF

Qu’est ce que le TSPT ?

Le trouble de stress post-traumatique, qu’on désigne parfois par son abréviation TSPT, est un trouble qui survient à la suite d’un événement traumatisant dans lequel on est ou on se sent confronté à la mort (un conflit armé, un attentat, un accident de voiture…) ou on est attaqué dans son intégrité physique (une agression physique et/ou sexuelle, un viol etc.).

C’est une réaction à un stress intense, qui survient en général un mois après l’événement, mais qui peut aussi se manifester plusieurs mois voire plusieurs années après le traumatisme. Il touche davantage de femmes que d’hommes, et aussi les enfants. En savoir plus

Reconnaître les symptômes du TSPT

On retrouve quatre grands types de symptômes qui doivent persister au moins un mois et occasionner une gêne :

– De l’évitement : lorsqu’on évite de passer par telle rue, de faire telle activité, etc. En clair, on évite tout ce qui peut nous rappeler l’événement traumatisant.

– Des reviviscences : malgré nous, on va « revivre » l’événement traumatisant et les émotions ressenties à ce moment-là. Ce sont des moments particulièrement violents qui peuvent paralyser la personne en proie à ces reviviscences. Elles peuvent prendre la forme de flashbacks, de cauchemars…

– De l’hypervigilance : on va sursauter au moindre bruit, être tout le temps sur le qui-vive, se retourner tout le temps dans la rue pour voir si personne ne nous suit, etc.

– Des émotions ou idées négatives de soi : on va ressentir de la colère, de la peur, de la culpabilité ou de la honte en lien avec l’événement. Cela peut aussi être une Incapacité de se souvenir d’éléments importants de sa vie du ou des évènements traumatiques (typiquement en raison d’une amnésie dissociative et non pas à cause d’autres facteurs comme un traumatisme crânien, ou la consommation d’alcool ou de drogues)

Les facteurs de risque pour le TSPT

Tout le monde ne développe pas nécessairement un TSPT après un événement traumatisant, mais il y a des facteurs qui augmentent le risque. Ces facteurs comprennent :

– La gravité de l’événement ;

– La proximité de la personne par rapport à l’événement ;

– Le manque de soutien social ;

– Les antécédents de traumatismes passés ;

– Des antécédents d’autres troubles psychiques.

Il est important de comprendre que le TSPT n’est pas une faiblesse. Le TSPT est un trouble psychique qui peut apparaître chez toute personne ayant été exposée à des événements extraordinaires et menaçants. Dans les prochains chapitres, nous verrons comment identifier, gérer et surmonter le TSPT, que ce soit après une catastrophe naturelle ou toute autre expérience traumatisante.

Fiches TSPT dans d'autres langues / PTSD in other languages

– Fiche en anglais

– Fiche en albanais

– Fiche en arabe

– Fiche en géorgien

– Fiche en bengali

– Fiche en pachto

– Fiche en swahili

– Fiche en dari

– Fiche en tchétchène

Santé des personnes exilées : quelques repères

Naviguer dans le système de santé en France peut être complexe, mais les personnes en situation de migration, qu’elles aient ou non un titre de séjour, peuvent bénéficier d’un accès aux soins.

Après trois mois de séjour sur le sol français, vous pouvez demander l’Aide Médicale d’Etat (AME), qui permet une prise en charge à 100% des soins de santé – vous n’aurez ainsi pas à avancer les frais. Les Permanence d’Accès aux Soins de Santé (PASS) sont des services spécialement conçus pour proposer des soins aux personnes en situation de précarité, y compris aux personnes migrantes. Dans ces services, même si vous ne bénéficiez pas de l’AME, ou si vous êtes en situation irrégulière, vous pourrez bénéficier de consultations médicales et de soins gratuitement.

Les dispositifs spécifiques en santé mentale

Différents professionnels de santé mentale peuvent venir en aide aux personnes exilées. En dehors des urgences, certains centres hospitaliers proposent des PASS spécialisés en psychiatrie.

On peut également se tourner vers les Équipes Mobiles Psychiatrie Précarité (EMPP), qui se déplacent en général sur les lieux de vie des personnes concernées, et les Centres Médico-Psychologiques (CMP), des centres dédiés à la santé mentale partout en France (pour trouver le plus proche de chez vous, tapez CMP + le nombre de la grande ville la plus proche de chez vous dans n’importe quel moteur de recherche).

En libéral, c’est-à-dire en dehors des structures hospitalières, des psychologues et des psychiatres sont spécialisés dans la prise en charge des psychotraumatismes. Pour comprendre la différence entre « psychiatre » et « psychologue » et en savoir plus sur les traitements > Chercher de l’aide

Des consultations sont possibles dans les Centres Régionaux du Psychotraumatisme (CRP) mais l’attente peut être longue avant d’obtenir un rendez-vous.

Est-ce que je risque quelque chose à demander de l’aide ?

Il est courant, lorsque l’on a vécu un événement violent, de réagir à celui-ci et de se sentir mal. Quand on se casse une jambe, il est normal de ressentir de la douleur et de chercher à l’amoindrir. Il en est de même pour les traumatismes psychologiques !

Demander de l’aide quand on pense souffrir d’un trouble de stress post-traumatique n’est pas le signe d’une faiblesse. Ça ne veut pas dire, non plus, qu’on est « fou ». Il existe des thérapies pour aller mieux et vivre plus sereinement, même quand on a vécu des choses horribles.

Si vous demandez de l’aide à un médecin, à une infirmière, ou à un psychologue :
– Vous ne serez pas jugé ;
– Votre famille ne sera pas impactée ;
– Vous ne serez pas hospitalisé de force ;
– On ne vous forcera pas à prendre des médicaments ;
– Personne d’autre ne sera au courant si vous souhaitez que cela reste entre le soignant et vous.

Dans tous les cas, les professionnels de santé mentale se doivent de respecter la confidentialité des échanges. Ce que vous leur direz n’aura aucun impact sur votre demande d’asile éventuelle et votre situation administrative en général, sauf si vous en faites la demande.

Pour en savoir plus sur la santé mentale et l’accompagnement des personnes exilées en France, n’hésitez pas à consulter ce guide pratique très complet réalisé par l’Orspere-Samdarra.

Comment l’exil nous affecte ?

L’expérience de l’exil est souvent marquée par des traumatismes qui vont au-delà des violences directes subies par exemple dans son pays d’origine. Les pertes, les séparations familiales, et les changements radicaux dans notre environnement peuvent provoquer des blessures psychiques profondes, ou accentuer les blessures existantes.

Les violences faites aux femmes en migration

Les femmes subissent des violences supplémentaires en raison de leur genre tout au long de leur parcours d’exil. Il est difficile de déterminer des chiffres, mais on estime que la quasi-totalité d’entre elles subissent des violences sexuelles durant leur trajet migratoire. En 2019, une enquête réalisée par la Commission des Femmes Réfugiées pointait du doigt le passage en Libye, où de nombreuses femmes en migration subissaient des agressions sexuelles allant jusqu’au viol, ayant pour conséquence des grossesses non désirées et parfois des suicides.

Les témoignages font état de :
– Violences sexuelles ;
– Viol ;
– Mariages forcés ;
– Exploitation sexuelle ;
– Torture, etc.

Au-delà du tabou qui entoure les questions de violences sexuelles, le phénomène de dissociation inclut des réactions de sidération et d’amnésie qui empêchent souvent les femmes victimes de témoigner de leur vécu, encore moins dans un temps court. Selon une étude suédoise publiée en 2017, 70 % des victimes de violences sexuelles seraient concernées par la sidération . Cette incapacité a une influence sur leur demande d’asile, durant laquelle on leur demande de raconter dans le détail les violences qu’elles ont vécues et d’être crédibles, ce que la dissociation rend impossible (voir plus bas « les conditions d’accueil »).

Le phénomène de dissociation explique pourquoi de nombreuses femmes ne parviennent pas à réagir, à dire non, à se défendre, lors d’une agression sexuelle. Pour en savoir plus sur ce mécanisme psychologique fréquent, vous pouvez consulter la vidéo « Viol : pourquoi le cerveau empêche certaines victimes de réagir » du journal Le Monde (attention, contient des témoignages).

Ces violences de genre exacerbent les risques de troubles de stress post-traumatique (TSPT) chez les femmes exilées. Les conséquences psychologiques de telles expériences sont profondes et la stigmatisation sociale associée à ces violences peut entraver l’accès à un soutien adéquat.

Les conditions d'accueil

Au-delà des violences commises dans le pays d’origine des demandeurs d’asile et de celles vécues tout au long du parcours migratoire, les conditions d’accueil en France peuvent également avoir un impact sur la santé mentale des personnes exilées.

Parmi les éléments qui affectent les personnes exilées et peuvent constituer un frein au rétablissement on trouve :
– Un sentiment d’incertitude face à l’avenir ;
– Des faibles ressources financières ;
– Un défaut de protection maladie
– La barrière de la langue ;
– Le labyrinthe des démarches administratives ;
– Des difficultés du quotidien pour se nourrir, se loger et travailler ;
– De l’isolement ;
– La crainte d’être enfermé(e) en Centre de Rétention Administrative (CRA) et expulsé(e) etc.

Ces facteurs de vulnérabilité sont fréquents et se cumulent. D’après une étude de Santé Publique France publiée en 2017, un quart des personnes exilées cumulaient au moins cinq critères de vulnérabilité.

La procédure de demande d’asile déclenche également beaucoup de stress. Lorsqu’on a vécu des expériences traumatiques dans son pays d’origine, telles que la violence physique, la persécution politique, la guerre etc., la procédure d’asile peut raviver ces traumatismes, car nous devons souvent raconter en détail ces expériences traumatisantes pour étayer notre demande.

En outre, les procédures d’asile peuvent être longues et incertaines. Cette attente prolongée peut générer un stress chronique, d’autant qu’elle s’ajoute à la crainte d’être à nouveau confronté à des situations dangereuses et violentes si la demande d’asile est refusée.

Les procédures d’asile, en remettant en question le passé traumatique des demandeurs, peuvent réactiver les souvenirs d’événements traumatisants, entraînant des symptômes tels que des flashbacks, des cauchemars, de l’anxiété et de l’évitement des stimuli liés au trauma.

Les autres mots du trauma

Vous ne décrivez peut-être pas le trouble que vous ressentez à la suite de situations traumatiques de la même manière, en parlant de trouble de stress post-traumatique, ou « PTSD », en anglais. Dans certaines cultures non-occidentales, les manifestations de détresse psychologique peuvent être interprétées et décrites différemment. Parfois encore, vous attribuerez l’origine de votre douleur à d’autres éléments. Voici quelques exemples de concepts qui peuvent renvoyer au trauma et que vous pouvez mentionner dans le cadre d’une consultation transculturelle

> En Amérique latine, une « attaque de nervios » est souvent caractérisée par des réactions émotionnelles intenses, telles que pleurer, crier, ou perdre temporairement la conscience, en réponse à un stress émotionnel. Certains épisodes de dissociation et d’anxiété extrême observés dans un attaque de nervios peuvent être comparables à des réactions observées chez certaines personnes à l’épreuve de TSPT.

> Dans la culture du Maghreb, le concept de « Jinn » représente des entités spirituelles, et certaines affections sont parfois attribuées à leur influence. Bien que le concept de Jinn ne soit pas directement comparable au TSPT, des manifestations psychologiques peuvent être interprétées différemment en fonction des croyances culturelle.

> Le « khal’a » est un terme utilisé dans certaines cultures du Maghreb pour décrire un état de peur intense ou de choc résultant souvent d’une expérience traumatisante. Il est parfois associé à des manifestations physiques et émotionnelles, telles que des tremblements, des cauchemars, et des troubles du sommeil. Le khal’a peut être interprété comme une réaction au trauma, et ses symptômes peuvent se chevaucher avec ceux du TSPT. Les deux troubles impliquent une réponse prolongée au stress.

> Le « susto » est un terme d’origine espagnole qui signifie « effroi » ou « choc ». Il est utilisé en Amérique du Sud pour décrire une situation au cours de laquelle une personne peut ressentir une détresse psychologique après avoir vécu un événement traumatisant. Les symptômes du susto, tels que les cauchemars, présentent des similitudes avec ceux du TSPT. Les deux troubles peuvent résulter d’événements traumatisants et partagent des aspects de détresse psychologique.

Ces quelques exemples de concepts culturels soulignent la diversité des réponses au trauma à travers le monde et la manière dont différentes sociétés conceptualisent et comprennent ces expériences.

Dans tous les cas, ne craignez pas d’expliquer au soignant face à vous l’origine de votre souffrance, même si elle lui est inconnue ou non-familière. Des consultations sont par ailleurs spécialisées en psychiatrie transculturelle (voir « À qui demander de l’aide ? »), pour prendre en compte ces différences et proposer des accompagnements adaptés.

A qui demander de l’aide ?

Au-delà des services de soin accessibles aux personnes exilées (voir plus haut Le système de santé en France pour les étrangers et Les dispositifs spécifiques en santé mentale) plusieurs structures peuvent vous accompagner à traverser cette période difficile.

Les structures existantes

> Des associations telles que Médecins du Monde, La Cimade, ou France Terre d’Asile peuvent vous orienter vers des services de santé mentale adaptés aux personnes exilées et proposer un accompagnement spécifique ;

> Des centres spécialisés comme le Centre Primo Levi (Paris) ou Osiris (Marseille) offrent un soutien psychologique aux personnes exilées. Vous pouvez contacter ces structures pour obtenir des informations sur les services disponibles ;

> En cas d’urgence, vous pouvez à tout moment contacter le 15. Par ailleurs, si vous ou votre proche développez des idées suicidaires, contactez le 3114, numéro national de prévention du suicide.

Faire appel à un interprète

Si vous ne parlez pas bien français ou si vous souhaitez venir en aide à un proche qui ne parle pas français, il peut être utile de faire appel à un interprète. Dans ce cas, lorsque vous prenez rendez-vous avec un professionnel de santé, informez le personnel que vous avez besoin d’un interprète. Dans l’idéal, la structure fera appel à un interprète professionnel qui maîtrise votre langue maternelle.

Cet interprète est lui aussi tenu de respecter la confidentialité des échanges que vous pourrez avoir avec le soignant. Il ou elle est là pour garantir une communication claire et confidentielle entre vous et le professionnel de la santé, veiller à ce que vous compreniez bien les questions du professionnel de santé et que vos réponses soient correctement transmises.

Si vous avez des préoccupations pendant la consultation, n’hésitez pas à les exprimer. Des ajustements peuvent être faits pour garantir votre confort. L’objectif est de vous offrir des soins adaptés à vos besoins, malgré les différences linguistiques. Ne vous retenez pas de partager vos préoccupations et de poser des questions si vous ressentez un malaise lors des consultations et des moments de traduction.

10 techniques pour s'aider soi-même

En plus de rechercher de l’aide professionnelle, il existe des techniques que vous pouvez utiliser pour vous aider à faire face au TSPT. Il ne s’agit pas de « guérir » du traumatisme ni de remplacer un traitement ou une thérapie, mais de quelques conseils pour la vie de tous les jours.

Voici quelques exemples > 10 techniques pour s’aider après un traumatisme

Comment aider un enfant ?

L’exil peut avoir des conséquences profondes sur la santé mentale des enfants, pouvant se manifester, entre autres, par un trouble de stress post-traumatique (TSPT). Le fait d’être un enfant, même très jeune, n’immunise pas contre le traumatisme et n’empêche pas de développer un trouble de stress post-traumatique. C’est la même chose pour les adolescents.

Les signes du TSPT chez l'enfant et l'adolescent

Les enfants en exil peuvent manifester des signes spécifiques de TSPT, aggravés par les conditions précaires de vie. Les symptômes peuvent inclure des peurs intenses, des cauchemars, une difficulté à distinguer le passé du présent, des réactions de stress liées à l’incertitude de leur situation…

La plupart du temps, les enfants et adolescents en situation d’exil seront davantage touchés par ce qu’on appelle le trouble de stress post-traumatique complexe, parce qu’ils auront connu des violences prolongées et/ou répétées, que ce soit dans leur pays d’origine, sur le chemin de l’exil ou une fois arrivés en France.

Les signes qui doivent alerter :

– Difficultés à réguler ses émotions
– Attachement fragile
– Régressions et changement émotionnel brusque
– Agressivité́ envers soi et avec les autres
– Difficultés de comportements, d’attentions et d’apprentissages
– Troubles du sommeil et de l’alimentation
– Manifestations somatiques (maux de ventres, maux de tête, eczéma, etc.)
– Sentiment de ne jamais être à la bonne place
– Culpabilité, haine de soi, manque de confiance en soi
– Conduites à risques
– Difficultés à poser des limites

Plus d’infos dans cette fiche consacrée au trouble de stress post-traumatique complexe chez l’enfant et l’adolescent.

À qui demander de l’aide pour mon enfant / adolescent ?

En plus des structures référencées au début de ce dossier, une aide peut être proposée :

– Dans les centres médico-psychopédagogiques (CMPP) répartis partout en France ; pour les trouver, tapez « CMPP » le nom de la grande ville la plus proche de chez vous dans n’importe quel moteur de recherche. Ces centres proposent des accompagnements spécifiques pour les enfants et les adolescents ;

– Dans les maisons des adolescents (MDA), spécialement conçues pour accompagner et aider les ados et jeunes adultes ;

– Par les services de la protection maternelle et infantile (PMI), pour les femmes enceintes et les jeunes enfants.

Au-delà de l’aide que vous pouvez trouver au sein d’associations, voici quelques conseils pour accompagner votre enfant à faire face au traumatisme de l’exil et l’aider à vivre mieux au jour le jour, en fonction de son âge.

Comment aider son enfant (0 à 5 ans)

– Créez des routines : Les routines stables offrent un sentiment de sécurité, essentiel pour réduire l’anxiété. Le réconfort régulier, comme les câlins avant le coucher, crée des moments apaisants qui aident à atténuer les effets du traumatisme.

– Jouez avec votre enfant : Utilisez le jeu comme moyen pour votre enfant de libérer ses émotions. Les jouets peuvent être des outils thérapeutiques simples pour exprimer des sentiments difficiles.

– Favorisez le contact physique : Le contact physique, tel que les câlins, libère des hormones apaisantes. Cela contribue à réduire le stress, à renforcer le lien affectif, en fournissant un soutien émotionnel crucial.

Comment aider son enfant (6 à 12 ans)

– Misez sur les loisirs créatifs : Encouragez votre enfant à s’exprimer par l’art (dessin, peinture, écriture, danse…). L’expression artistique offre un moyen de donner forme aux émotions difficiles à exprimer verbalement. Cela permet à l’enfant de mieux comprendre et de faire face à ses expériences douloureuses.

– Ne reniez pas votre culture : Maintenez une connexion avec la culture d’origine, grâce à des proches qui partagent cette même culture, la transmission d’une langue maternelle, la célébration de fêtes et le maintien des traditions etc. Cela peut être un point d’ancrage essentiel pour l’identité de l’enfant dans un contexte nouveau. Cela aide l’enfant à se sentir plus enraciné, renforçant sa résilience face aux changements.

– Proposez des activités apaisantes : Les activités sportives ou artistiques libèrent des endorphines qui agissent comme des antidépresseurs naturels. Elles aident à libérer le stress accumulé et à promouvoir le bien-être émotionnel.

Comment aider son enfant (13 à 18 ans)

– N’ayez pas peur d’en parler : Ça n’est pas toujours facile, mais le fait d’exprimer ouvertement leurs expériences peut aider les adolescents à comprendre et à traiter leurs émotions. Le dialogue ouvert crée un espace sûr pour partager des pensées et des préoccupations.

– Tournez le vers l’avenir : Avoir des objectifs futurs donne un sens à l’expérience : compétition sportive, études… Cela peut aider les adolescents à se concentrer sur la construction d’un avenir positif plutôt que de rester focalisés sur le passé douloureux.

– Veillez à ce qu’il soit entouré : Facilitez la participation à des groupes de soutien entre pairs. Les adolescents peuvent trouver du réconfort et des conseils auprès de ceux qui partagent des expériences similaires.

Les mineurs non-accompagnés (MNA)

En 2022, environ 15 000 enfants et adolescents étaient considérés comme des mineurs étrangers non-accompagnés et confiés à l’Aide Sociale à l’Enfance (ASE). Ces jeunes sont d’autant plus fragiles et concernés par le psychotrauma car aux traumatismes vécus s’ajoutent les difficultés liées à la solitude et à la difficulté de faire reconnaître leurs droits.

Plus d’infos concernant les mineurs non-accompagnés sur le site InfoMIE, centre de ressources sur les mineurs isolés étrangers.

Troubles psychiques présentés

Entre 40% et 50% de ces jeunes présenteraient des troubles psychiques qui nécessiteraient des soins à leur arrivée en France. Les troubles les plus fréquents sont :

– La dépression, allant parfois jusqu’au suicide ;
– Des troubles anxieux ;
– Des troubles de deuil prolongé (notamment lorsque ces jeunes ont perdu leurs parents)
– Un trouble de stress post-traumatique (TSPT)

! Les enfants et adolescents garçons sont régulièrement victimes de violences sexuelles durant leur parcours migratoire !

Pourquoi parle-t-on de « mijeur » ?

Le fait d’être « mijeur », c’est-à-dire un mineur non-reconnu comme tel, peut ajouter une source de stress supplémentaire à la situation déjà difficile des individus concernés. En n’étant pas reconnu comme un enfant aux yeux de la loi parce que démuni de la capacité de le prouver (avec un extrait de naissance par exemple), ces jeunes se retrouvent dans une zone grise où ils ne bénéficient pas de la protection de l’enfance ni des droits accordés aux adultes.

Cette situation les laisse souvent vulnérables et démunis, confrontés à des défis tels que l’accès aux services de base, y compris l’éducation, la santé et la protection sociale. Le manque de reconnaissance de leur statut de mineur peut également entraîner des obstacles supplémentaires dans leur parcours migratoire, les exposant à un risque accru d’exploitation, de violence et de marginalisation.

Être « mijeur » peut aggraver le stress et l’incertitude déjà présents dans la vie des mineurs non-accompagnés, compromettant leur bien-être et leur capacité à s’intégrer dans leur nouvel environnement.

Travailleurs sociaux, bénévoles, comment aider ?

Les professionnels qui interagissent régulièrement avec les personnes en exil, que ce soit en tant que travailleurs sociaux, professionnels de santé, éducateurs, bénévoles dans des associations, ou dans des centres d’accueil et d’hébergement d’urgence, sont en première ligne dans le dépistage du trouble de stress post-traumatique.

Dans vos interactions quotidiennes avec ces personnes, vous êtes souvent témoins des difficultés concrètes auxquelles elles sont confrontées : le manque de ressources financières, les conditions de logement précaires, les barrières linguistiques, l’accès limité aux services de santé, ainsi que les traumatismes liés à la migration, comme les expériences de violence et de deuil.

Repérer les signes du TSPT

Votre rôle en matière de dépistage du TSPT est crucial, d’autant que dans beaucoup de cultures, faire appel à un professionnel de la santé mentale ne va pas de soi et beaucoup ignorent même que ce type d’aide existe.

Voici les signes auxquels être attentifs :

– Des flashbacks ;

– Des cauchemars récurrents ;

– Une hypervigilance ;

– Des réactions de sursaut excessives ;

– Une détresse émotionnelle intense

– Des difficultés de concentration ;

– Des troubles du sommeil ;

– Des comportements d’évitement ;

– Des changements soudains dans le comportement ou l’humeur.

En reconnaissant ces signaux, vous pouvez jouer un rôle crucial en orientant les personnes vers des ressources appropriées et en les soutenant dans leur accès aux services de santé mentale.

Conseiller et orienter

On ne sait pas toujours quoi faire lorsqu’on accompagne une personne en souffrance qui présente des signes de TSPT. Au-delà de l’orientation vers un professionnel de santé, on peut accompagner la personne concernée au quotidien :

> Lorsque vous conseillez et orientez les personnes en exil, transmettez leur des informations claires sur le trouble de stress post-traumatique (TSPT) dans une langue et une forme qu’elles peuvent comprendre. Cela peut inclure la fourniture de fiches d’information traduites dans différentes langues, afin qu’elles puissent mieux appréhender ce qui leur arrive. Voir en haut de page « PTSD in English and other languages ».

Concernant le recours à un interprète, vous pouvez consulter notre fiche « Le recours à l’interprétariat pour accueillir et soigner la personne exilée » ainsi que le replay de notre webinaire sur l’interprétariat dans la prise en soin des exilés traumatisés.

Deux applications utiles faute d’interprète :
TraducMed, un site et une application destinées aux soignants et sa déclinaison pour les travailleurs sociaux et accueillants d’association ;
MediPicto, une application dédiée aux patients et aux professionnels de santé.

> Rassurez les personnes en exil sur le fait que consulter un psychologue ou un professionnel de la santé mentale ne signifie pas qu’ils sont « fous ». Soulignez qu’elles ne seront pas forcées à raconter toute leur histoire à nouveau et qu’il existe des moyens de se sentir mieux.

> Prenez également en compte les différences culturelles lorsqu’on aborde le TSPT. Essayez de comprendre comment elles perçoivent leurs symptômes, à qui ou à quoi elles attribuent leur souffrance, et comment elles géreraient cette situation dans leur pays d’origine.

> Créer un cadre rassurant et stable est essentiel pour aider les personnes en exil à se sentir en sécurité. Veillez à conserver un lien durable avec les personnes que vous conseillez et orientez. Le soutien social joue un rôle crucial dans le processus de guérison du TSPT, donc maintenir une relation continue et empathique peut être un facteur de protection essentiel pour leur bien-être mental.

Pour en savoir plus sur la manière d’accompagner des personnes en exil souffrant de troubles post-traumatiques, n’hésitez pas à consulter ce guide très complet réalisé par l’Ospere-Samdarra : « Soutenir la santé mentale des personnes migrantes, guide ressource à destination des intervenants sociaux« .

Se protéger soi-même

Votre engagement auprès des personnes en exil peut avoir un impact significatif sur votre propre bien-être mental. Le fait d’être exposé de manière répétée à des situations ou des récits traumatisants augmente le risque de développer un trouble de stress post-traumatique vicariant.

Le TSPT vicariant ?
Le trouble de stress post-traumatique vicariant (TSPT vicariant) est une forme de stress traumatique qui affecte les individus qui sont exposés de manière répétée aux récits ou aux expériences traumatisantes des autres, souvent dans le cadre de leur travail ou de leur engagement professionnel. Contrairement au TSPT classique, où l’individu est directement exposé à un événement traumatisant, le TSPT vicariant se développe chez ceux qui entendent parler ou témoignent des traumatismes vécus par autrui.

Ce phénomène est courant chez les professionnels travaillant dans des domaines tels que la santé mentale, les services sociaux, les secours d’urgence et le journalisme, où ils sont régulièrement confrontés aux récits de souffrance et de traumatismes des autres. Les signes et symptômes du TSPT vicariant sont similaires à ceux du TSPT classique et peuvent inclure des flashbacks, des cauchemars, de l’irritabilité, de l’anxiété, de l’évitement des situations rappelant le traumatisme, des troubles du sommeil et une détresse émotionnelle.

Il est essentiel de reconnaître les signes du TSPT vicariant et de prendre des mesures pour prévenir son développement en mettant en place des stratégies d’autosoins, en recherchant un soutien professionnel et en prenant des pauses régulières pour se ressourcer émotionnellement.

Certains signes peuvent vous alerter sur l’état de votre santé mentale et la possibilité que vous soyez en train de développer un TSPT vicariant. Par exemple :

– Si vous avez du mal à vous détacher de votre travail une fois chez vous ;

– Si vous vous sentez constamment préoccupé par une personne que vous accompagnez ;

– Si vous ressentez de la colère ou de l’irritabilité de manière disproportionnée ;

– Si vous avez l’impression d’être submergé par vos émotions sans pouvoir garder de distance.

D’autres signaux peuvent inclure des perturbations dans votre sommeil, une vigilance accrue voire excessive, ou des changements dans vos habitudes alimentaires ou votre comportement social. Si vous remarquez ces signes persistants, n’hésitez pas à parler à un professionnel de santé, comme votre médecin traitant. Ils peuvent vous aider à trouver des stratégies pour gérer votre stress et votre anxiété, et vous orienter vers des ressources supplémentaires si nécessaire. Se faire aider dès les premiers signes peut contribuer à prévenir l’aggravation des symptômes.

Si vous avez besoin de soutien psychologique, le dispositif national de Parcours d’Exil « Résonances » (soutien aux professionnels) est à votre écoute.

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