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Réforme des retraites : les violences en manifestation peuvent elles provoquer un trouble de stress post-traumatique ?

On connaissait les street-medics, désormais des “street-psys” interviennent lors de manifestations pour apporter de l’aide et faire de la prévention auprès des manifestants. Début avril, une cellule de soutien psychologique a été mise en place par les organisateurs des manifestations contre les “méga-bassines”, à Sainte-Soline. Quels facteurs de risques sont présents lors de ces manifestations ? Et comment prévenir l’apparition d’un trouble de stress post-traumatique (TSPT) dans ce cas de figure ?

« Les militants, ce sont des gens qu’on voit peu. Parce qu’ils se disent « il faut être fort, on lutte« . Mais n’importe quelle manifestation peut être traumatique en fonction de la personne », entame Lauriane Perez, psychologue clinicienne en libéral dans la région de Nantes. Depuis la crise des Gilets Jaunes, elle s’intéresse de près au TPST chez les manifestants victimes ou témoins de violences. « A l’époque, j’ai été contactée par des street-medics qui cherchaient une psychologue « safe » pour parler de ces questions parce qu’ils repéraient beaucoup de personnes très choquées à l’issue des rassemblements », explique la psychologue.

Si les violences physiques sont régulièrement dénoncées dans la presse, les violences psychologiques le sont beaucoup moins. Pourtant, elles peuvent laisser des traces. « On peut déceler plusieurs troubles psy comme de l’anxiété, des phobies, de la culpabilisation quand les militants ne peuvent plus continuer à manifester », observe la psychologue. « A partir du moment où il y a de la violence, cela constitue un facteur de risque. D’autant plus pour les militants qui participent régulièrement à des manifestations – comme c’était le cas pour les Gilets Jaunes – et qui réactivent leur trauma à chaque fois. »

Les manifestations « présentent de nombreux facteurs de risque » : le caractère soudain de l’événement, les stimulations intenses (comme le bruit des grenades désencerclantes), la confrontation à la réalité de la mort via le danger d’atteinte à son intégrité physique… « C’est pour ça qu’il est important de s’y préparer, parce que le trauma est associé à quelque chose de soudain. Il faut s’entourer de personnes ressources pour pouvoir se soutenir mutuellement. S’autoriser à s’extraire si on se sent envahi, quitte à revenir plus tard. Prévoir un temps après la manif pour débriefer au calme, éviter de regarder en boucle les images des manifestations et bien sûr consulter si cela dure trop longtemps », poursuit la clinicienne.

Sainte-Soline : prévenir avant même la manif

Ce risque est néanmoins de plus en plus pris en compte dans les milieux militants. Dans le cadre de la manifestation contre la méga-bassine de Sainte-Soline, fin mars, les organisateurs ont ainsi mis en place une cellule d’aide psychologique en amont de la manifestation.

“Beaucoup sont sous le choc parce qu’ils ont traversé une épreuve de violence très déshumanisée. On commence donc par les remettre dans un contexte humain : écouter leur vécu, dans un cadre safe et dans une relation de confiance”, expliquait sur le terrain l’un des membres de cette cellule aux journalistes de Reporterre.

La cellule a permis un accueil et une première écoute lors de la manifestation et a poursuivi son action via la mise en place d’une ligne téléphonique. Dès les premiers jours suivant la manifestation, l’équipe a reçu une cinquantaine d’appels de personnes en “détresse psychologique urgente”.

Beaucoup de gens ont des flashback des images de blessés. Ils revivent leur expérience parce qu’ils la voient comme un non-sens complet”, explique l’une des psychologues cliniciennes à Reporterre, qui s’attend “à une vague de stressés post-traumatiques ».

  • Stress aigu ou post-traumatique ? Le trouble de stress aigu peut survenir juste après l’événement traumatisant. On parle de TSPT lorsque les symptômes durent plus d’un mois. C’est pourquoi, les jours suivant l’événement traumatisant, il est primordial de s’entourer et de parler de ce qui s’est passé, afin de limiter les risques de développer un TSPT.

A Hong-Kong, une hausse spectaculaire du TSPT 

Publiée en 2020 dans la revue The Lancet, une étude s’est intéressée au TSPT à Hong-Kong, dans le contexte de la mobilisation populaire pour plus de démocratie, qui a été émaillée de nombreuses violences policières. La santé mentale de 18 000 personnes a été étudiée entre 2009 et 2019, régulièrement.  

Les auteurs soulignent que près d’un tiers des adultes hong-kongais présentaient des signes de TSPT depuis le début de la mobilisation, alors qu’ils n’étaient que 5% en 2015. La consultation régulière des réseaux sociaux pour s’informer sur la mobilisation serait un facteur de risque supplémentaire.

« Au moment où les troubles sociaux augmentent un peu partout dans le monde, et notamment dans de grandes villes comme Barcelone, Delhi, Paris ou Santiago en 2019, la question de l’impact des troubles sociaux sur la santé mentale des populations est devenu un très grand enjeu de santé publique« , a indiqué à l’AFP l’un des codirecteurs de l’étude, Michael Ni, de l’université de Hong Kong.

  • Plus d’infos sur le TSPT sur notre page « Comprendre les psychotraumatismes« . Si vous pensez souffrir de TSPT, parlez en à votre médecin traitant et rapprochez vous des centres régionaux du psychotraumatisme (CRP). Pour trouver le CRP le plus proche de chez vous, rendez vous sur notre page « Localiser les structures de soin« .

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