Le poids de la « surcharge émotionnelle »
La surcharge émotionnelle décrit le poids cumulatif de la détresse absorbée par les professionnels. Ce modèle, appuyé par les travaux de Figley, met en lumière comment l’exposition répétée aux récits traumatisants peut éroder les frontières émotionnelles du soignant, conduisant à une fatigue de compassion. Brillon souligne l’importance de maintenir une posture empathique tout en évitant le piège de la sympathie excessive qui peut nuire à la distance professionnelle nécessaire. Ainsi, il ne faudrait pas confondre « sympathie » et « empathie » précise Pascale Brillon : « A la différence de la posture d’empathie, la posture sympathique serait le signe d’un engagement excessif envers la personne aidée. La sympathie entraverait le lien d’aide et rend vulnérable au traumatisme vicariant ou à la fatigue de compassion ».
Cette vulnérabilité du professionnel s’accompagne également d’une réponse physique involontaire : le phénomène du mimétisme corporel. Impliquant l’activité des neurones miroirs, leur implication est discutée en 2006 ; dans le contexte des découvertes de Rothschild & Rand. Ces auteurs illustrent comment les professionnels peuvent, sans en avoir conscience, absorber la détresse de leurs patients à travers une imitation physique et émotionnelle, soulignant la nécessité d’une prise de conscience et de stratégies pour gérer ces effets subtils.
Influence des « structures de peur » sur la sensibilité professionnelle
Explorant la manière dont les professionnels peuvent intégrer les structures de peur de leurs patients, ce modèle s’appuie sur les travaux de Foa, Steketee, & Rothbaum. Il révèle que l’exposition constante aux récits traumatiques peut amener le professionnel à réagir de manière hypersensible à des stimuli associés aux expériences traumatisantes des patients, nécessitant une vigilance et une gestion active de ces influences.
Confrontation avec les croyances fondamentales et blessures morales
Cette conceptualisation aborde le bouleversement des croyances personnelles face à l’exposition aux traumas. Celle-ci révèle comment les professionnels peuvent être ébranlés dans leurs croyances fondamentales sur la vie, la nature humaine, et la justice, conduisant alors à une vulnérabilité accrue au traumatisme vicariant et nécessitant un travail de réflexion et de soutien psychologique.
L’importance cruciale des stratégies d’auto-soin
Soulignant la négligence des pratiques d’auto-soin parmi les professionnels, ce modèle renvoie à des travaux antérieurs qui critiquent une culture professionnelle souvent centrée sur l’abnégation. Ces travaux appuient la nécessité d’équilibrer le dévouement aux autres avec une attention portée à soi-même est ainsi mise en avant comme un pilier central pour prévenir le traumatisme vicariant.
Conjugaison d’évènements perturbateurs et vulnérabilité
Basée sur de nombreux travaux, cette cinquième conceptualisation présentée par Pascale Brillon examine comment un événement perturbateur, en combinaison avec des facteurs de risques accumulés, peut fragiliser les professionnels de la relation d’aide. Ces événements déclencheurs, tels qu’un conflit avec un patient ou le suicide d’un patient, surviennent sur un fond de stress et de vulnérabilités préexistants, influençant la réaction du professionnel. Les conditions antérieures et postérieures à l’événement, y compris l’état psychologique et physique du professionnel, ainsi que les traits de personnalité et les stress vécus, jouent ainsi un rôle crucial dans la gestion de l’événement et peuvent soit réduire soit exacerber son impact.