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Les affrontements se poursuivent au Soudan et les civils sont de plus en plus nombreux à fuir. L’ONU recense dans son rapport du 9 mai plus de 700 000 personnes déplacées dans le pays. Plus tôt, on dénombrait déjà 117 000 personnes réfugiées dans d’autres pays, principalement limitrophes. La France a rapatrié plusieurs centaines de personnes qui se trouvaient au Soudan lors de l’éclatement du conflit, le 15 avril dernier. Une prise en charge psychologique d’urgence a été mise en place dès leur arrivée à l’aéroport de Roissy pour leur venir en aide et prévenir le risque de trouble de stress post-traumatique.

Terminal 2 de l’aéroport Roissy-Charles de Gaulle, le 26 avril dernier. Le jour se lève et des dizaines de personnes s’affairent déjà pour préparer l’accueil des quelques 260 rapatriés du Soudan qui ne vont pas tarder à atterrir. Parmi ces professionnels et bénévoles, Lydie Lenglart, référente psychologue pour la CUMP 93 et huit de ses collègues, dont une interne psychiatre. Leur mission ? Proposer une écoute et “un bain empathique” aux rapatriés. “En tentant de fuir vers l’aéroport, la plupart ont vu des cadavres dans un état difficile, des scènes d’horreur, certains ont été pris d’assaut par la milice, menacés avec des armes à feu, séquestrés… Notre mission, dans l’immédiat, c’est de les ramener dans le monde des vivants”, explique la psychologue.

Dans le langage professionnel, on appelle ça le “defusing” : un soin psychique d’urgence à proposer dans les premières heures suivant l’événement traumatique. Une technique régulièrement employée par les professionnels des CUMP, les Cellules d’Urgence Médico-Psychologique. Ce jour-là, à l’aéroport, il ne s’agit pas de mener un débriefing psychologique ou d’entamer une thérapie, mais permettre aux rapatriés de verbaliser. “Pour le moment, ces personnes sont hébergées à l’hôtel, c’est provisoire. Si finalement elles partent rejoindre des amis ou de la famille en province, on les met en relation avec les CUMP locales. Commencer une thérapie ici, ce serait comme un chirurgien qui ouvrirait un ventre et le laisserait ouvert”, précise la psychologue.

 

En attendant, l’aide de premier soin proposée par la CUMP 93 est appréciée. Ce jour-là, au sein de l’aéroport, les professionnels échangent avec une centaine de personnes. Avant l’atterrissage de l’avion, ils prennent aussi le temps de parler aux familles et aux proches. “Le but c’est de ne pas les laisser seuls avec leur proche qui fait des cauchemars, qui sursaute au moindre claquement de porte…”, ajoute Fabrice Viel, lui aussi référent psychologue au sein de la CUMP 93. “Il est important que les familles d’impliqués aient connaissances des symptômes du trouble de stress post-traumatique et qu’elles sachent qu’on peut le soigner.”

Une prise en charge immédiate

La prise en charge psychologique immédiate, dans les quelques heures suivant l’événement traumatique, est la mission principale des CUMP, cellules créées suite aux attentats du RER de Paris en 1995. A la demande de Jacques Chirac, le ministre Xavier Emmanuelli fit appel au médecin général Louis Crocq pour mettre en place ces cellules, qui ne tardèrent pas à intervenir conjointement avec le Samu sur plusieurs scènes d’attentats. Fabrice Viel fait partie des premiers à s’être porté volontaire, “d’abord en tant qu’infirmier, puis en tant que psychologue”.

“La particularité de la CUMP 93, c’est la présence des aéroports de Roissy et du Bourget, en général, lorsque des personnes sont rapatriées de l’étranger suite à un accident, une catastrophe, elles arrivent par-là”, poursuit Fabrice Viel, qui a travaillé sur l’accueil des réfugiés afghans, mais aussi à l’étranger suite aux affrontements de 2004 en Côte d’Ivoire, en Thaïlande suite au tsunami, la même année, ou encore après les explosions du port de Beyrouth, en 2020.

“Les passagers descendant d’un avion sont en nombre important et, ayant échappé à l’enfer, sont souvent peu enclin à attendre pour une consultation”, précise Thierry Baubet, psychiatre coordinateur de la CUMP 93. “L’accueil sur place doit donc être suffisamment étoffée afin de pouvoir voir plusieurs personnes simultanément.” Les cellules restent en général actives durant un mois. Ensuite, un accompagnement psychologique peut être proposé au sein des CRP, les centres régionaux du psychotraumatisme.

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